
Je signale un article intéressant (écrit par un ancien officier américain vivant à Bangkok) au sujet de la stratégie américaine d'”encerclement” (ou de “blocus“) de la Chine.
J’ai très souvent écrit au sujet de l’agressivité chinoise, expression d’une politique délibérée baptisée “guerre sans limite” avec pour cible principale les Etats-Unis… Mais il faut admettre que l’Oncle Sam est EGALEMENT extrêmement agressif face à Pékin et ses prétentions politiques (reprendre sa place : celle du milieu… l’empire du Milieu).
La traduction française est un peu faite avec les pieds, mais pas grave. Lien : https://reseauinternational.net/les-plans-americains-pour-un-blocus-de-la-chine-continuent-de-prendre-forme
Le levier principal de cet encerclement repose sur le point faible de la Chine : ses approvisionnements en énergie (et surtout le pétrole). La Chine en consomme énormément et en produit peu.
Le gros passe par la mer… dominée par les Etats-Unis qui prend un malin plaisir à appuyer sur des points de contention (détroit de Malaca, Golfe Persique, Iran, etc.).
Mais ce n’est pas tout. La boîte à outils américaine est bien fournie :
- coups d’état / révolutions de couleur
- déstabilisation / terrorisme
- alliances commerciales (le pognon) / militaires (le bâton)
- jusqu’aux guerres par proxy
En clair : la violence protéiforme.
Concernant les guerres par proxy, on citera l’Ukraine évidemment (pour affaiblir voire dépecer la Russie), l’Iran (avec Israël), mais aussi les attouchements américains en Birmanie où la Chine construit des pipelines pour justement équilibrer le risque sur le détroit de Malacca, sans parler des fantaisies terroristes menées au Pakistan (la CIA excite des groupes du Balouchistan qui attaquent des intérêts chinois).
Liste non exhaustive !
Enfin, les morceaux les plus visibles comme Taiwan, le Japon, la Corée du sud, les Philippines qui complètent le dispositif. Là, il s’agit de fixer la Chine et de lui contester l’accès à la mer (mer de Chine, pourtant sa mer “intérieure”, et le Pacifique).
L’Oncle Sam occupe une centaine de bases militaires au Japon et en Corée du sud pour un total de 83 000 personnels !
Ces bases sont systématiquement présentées comme défensives. Alors que vues de Pékin elles incarnent une agression permanente (l’empêchant de jouir de sa zone d’influence naturelle).
Concrètement, les Etats-Unis font donc feu de tout bois, exactement comme la Chine. Si les 2 acteurs n’ont pas le même texte, ils partagent bien la même scène.
L’article a aussi raison de rappeler que face à Trump, il ne faut pas écouter les discours, mais analyser les actes.
America First, le repli sur soi… étaient manifestement des faux semblants de campagne électorale. Idem pour l’art du deal, la marotte de Trump.
C’est du pipo, de l’emballage, du marketing voire même des psyops (pour endormir l’adversaire ou faire diversion, Trump excelle dans ce rôle, le “madman“, sorte de Richard Nixon sous stéroïdes).
A peine élu, nous devons admettre que le président américain s’est coulé dans le moule géopolitique classique, en y apportant certes son style particulier.
L’administration Trump réaffirme l’objectif stratégique de “contenir” la Chine qui avait été un peu ramolli durant la présidence Biden (et encore, pas avec le conflit ukrainien, dont la cible était la Russie et donc également la Chine).
On note des constantes dans le domaine de la politique étrangère de Washington, avec des différences de rythme, d’amplitude et de style en fonction des administrations.
Ce “containement” est ainsi identique à celui opposé à l’Union Soviétique durant la guerre froide (on peut y ajouter la théorie du “rollback“, plus agressive face à la menace communiste de l’époque).
L’action géopolitique des Etats-Unis s’appuie sur trois leviers :
-l’exceptionnalisme (quelque chose de spécifiquement américain et qui n’est pas seulement l’enfant terrible des empires coloniaux britanniques ou français de la grande époque… les Américains ont un grain – au sens de folie- très particulier)
-l’importance de la domination des mers (évidence héritée du colon britannique)
-la mise en oeuvre de la théorie du Heartland (Mackinder, 1904) : on boucle sur l’opposition mer/terre, la puissance maritime devant ainsi contenir la puissance terrestre (en 1939, les Etats-Unis ne pouvaient pas laisser l’Allemagne nazie s’emparer de toute l’Europe, et plus tard, idem face à l’Union Soviétique).
Conclusion ? la guerre sino-américaine est bien réelle. Et intense.
L’empire de l’Ouest cherche systématiquement à attaquer car il ne peut que constater le développement à marche forcée de la puissance terrestre (Chine et ses alliés, comme la Russie etc.).
A terme, sa défaite est probable car il subit l’inexorable déclin des empires (surextension, fatigue), mais surtout parce que son “aire civilisationnelle” se fracture (guerre civile américaine 2.0 et invasion “migratoire” de l’Europe de l’Ouest).
C’est une faiblesse considérable face à l’homogénéité chinoise, un bloc civilisationnel (on peut même ajouter éthnique) dur, cohérent.
Ce fait est systématiquement ignoré alors que c’est la clé du conflit qui marquera le 21ème siècle.
Le corps (au sens organique) de l’Occident se disloque.
Aucun empire n’a jamais survécu dans ces conditions.
POST SCRIPTUM
Pourquoi j’insiste, systématiquement, sur le principe ethnique et celui d'”aire civilisationnelle” ?
Parce que les utopies universalistes ont échoué. Elles ont provoqué des ravages.
Leur dernier avatar, c’est-à-dire le globalisme, s’effondre sous nos yeux. Et il faut célébrer cet échec cinglant.
La modernité s’incarne désormais dans l’unicité ethnique, civilisationnelle. Si le mot vous effraie, parlons alors de “cohérence”.
Trivialement cela se traduit par “chacun chez soi“.
Appelons cela le “concert des nations”. Cela n’a jamais empêché les alliances ni la coopération.
Bref, ce n’est pas du tout le retour de la barbarie comme l’affirment les globalos-neuneus.
Mais au contraire le reflet de la diversité humaine, la vraie, celle qui est ontologique et donc nécessaire.
A cette aune, on peut affirmer que la Chine et la Russie (et d’autres) incarnent la modernité.
Les globalistes sont has been. Ils ont pris un terrible coup de vieux (visualisez le ravi de la Raiepoublique, Attali, avec son “un pays c’est un hôtel“).
Voilà la leçon historique que l’on peut -déjà- tirer de ce siècle.
